The Project Gutenberg EBook of Jeannot et Colin, by Voltaire (#11 in our series by Voltaire) Copyright laws are changing all over the world. Be sure to check the copyright laws for your country before downloading or redistributing this or any other Project Gutenberg eBook. This header should be the first thing seen when viewing this Project Gutenberg file. Please do not remove it. Do not change or edit the header without written permission. Please read the "legal small print," and other information about the eBook and Project Gutenberg at the bottom of this file. Included is important information about your specific rights and restrictions in how the file may be used. You can also find out about how to make a donation to Project Gutenberg, and how to get involved. **Welcome To The World of Free Plain Vanilla Electronic Texts** **eBooks Readable By Both Humans and By Computers, Since 1971** *****These eBooks Were Prepared By Thousands of Volunteers!***** Title: Jeannot et Colin Author: Voltaire Release Date: December, 2003 [EBook #4772] [Yes, we are more than one year ahead of schedule] [This file was first posted on March 16, 2002] Edition: 10 Language: French Character set encoding: ASCII *** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK, JEANNOT ET COLIN *** This eBook was produced by Carlo Traverso. We thank the Bibliotheque Nationale de France that has made available the image files at www://gallica.bnf.fr, authorizing the preparation of the etext through OCR. Nous remercions la Bibliotheque Nationale de France qui a mis a dispositions les images dans www://gallica.bnf.fr, et a donne l'authorization a les utilizer pour preparer ce texte. OEUVRES DE VOLTAIRE. TOME XXXIII DE L' IMPRIMERIE DE A. FIRMIN DIDOT, RUE JACOB, Ndeg. 24. OEUVRES DE VOLTAIRE PREFACES, AVERTISSEMENTS, NOTES, ETC. PAR M. BEUCHOT. TOME XXXIII. ROMANS. TOME I. A PARIS, CHEZ LEFEVRE, LIBRAIRE, RUE DE L'EPERON, Kdeg. 6. WERDET ET LEQUIEN FILS, RUE DU BATTOIR, Ndeg. 2O. MDCCCXXIX. JEANNOT ET COLIN. Preface de l'Editeur Les deux contes, _Le blanc et le noir_, _Jeannot et Colin_, font partie du volume qui parut, en 1764, sous le titre de Contes de Guillaume Fade. ------ Les notes sans signature, et qui sont indiquees par des lettres, sont de Voltaire. Les notes signees d'un K sont des editeurs de Kehl, MM. Condorcet et Decroix. Il est impossible de faire rigoureusement la part de chacun. Les additions que j'ai faites aux notes de Voltaire ou aux notes des editeurs de Kehl, en sont separees par un--, et sont, comme mes notes, signees de l'initiale de mon nom. BEUCHOT. 4 octobre 1829. JEANNOT ET COLIN. Plusieurs personnes dignes de foi ont vu Jeannot et Colin a l'ecole dans la ville d'Issoire, en Auvergne, ville fameuse dans tout l'univers par son college et par ses chaudrons. Jeannot etait fils d'un marchand de mulets tres renomme; Colin devait le jour a un brave laboureur des environs, qui cultivait la terre avec quatre mulets, et qui, apres avoir paye la taille, le taillon, les aides et gabelles, le sou pour livre, la capitation, et les vingtiemes, ne se trouvait pas puissamment riche au bout de l'annee. Jeannot et Colin etaient fort jolis pour des Auvergnats; ils s'aimaient beaucoup; et ils avaient ensemble de petites privautes, de petites familiarites, dont on se ressouvient toujours avec agrement quand on se rencontre ensuite dans le monde. Le temps de leurs etudes etait sur le point de finir, quand un tailleur apporta a Jeannot un habit de velours a trois couleurs, avec une veste de Lyon de fort bon gout; le tout etait accompagne d'une lettre a M. de La Jeannotiere. Colin admira l'habit, et ne fut point jaloux; mais Jeannot prit un air de superiorite qui affligea Colin. Des ce moment Jeannot n'etudia plus, se regarda au miroir, et meprisa tout le monde. Quelque temps apres un valet de chambre arrive en poste, et apporte une seconde lettre a monsieur le marquis de La Jeannotiere; c'etait un ordre de monsieur son pere de faire venir monsieur son fils a Paris. Jeannot monta en chaise en tendant la main a Colin avec un sourire de protection assez noble. Colin sentit son neant, et pleura. Jeannot partit dans toute la pompe de sa gloire. Les lecteurs qui aiment a s'instruire doivent savoir que M. Jeannot, le pere, avait acquis assez rapidement des biens immenses dans les affaires. Vous demandez comment on fait ces grandes fortunes? C'est parcequ'on est heureux. M. Jeannot etait bien fait, sa femme aussi, et elle avait encore de la fraicheur. Ils allerent a Paris pour un proces qui les ruinait, lorsque la fortune, qui eleve et qui abaisse les hommes a son gre, les presenta a la femme d'un entrepreneur des hopitaux des armees, homme d'un grand talent, et qui pouvait se vanter d'avoir tue plus de soldats en un an que le canon n'en fait perir en dix. Jeannot plut a madame; la femme de Jeannot plut a monsieur. Jeannot fut bientot de part dans l'entreprise; il entra dans d'autres affaires. Des qu'on est dans le fil de l'eau, il n'y a qu'a se laisser aller; on fait sans peine une fortune immense. Les gredins, qui du rivage vous regardent voguer a pleines voiles, ouvrent des yeux etonnes; ils ne savent comment vous avez pu parvenir; ils vous envient au hasard, et font contre vous des brochures que vous ne lisez point. C'est ce qui arriva a Jeannot le pere, qui fut bientot M. de La Jeannotiere, et qui, ayant achete un marquisat au bout de six mois, retira de l'ecole monsieur le marquis son fils, pour le mettre a Paris dans le beau monde. Colin, toujours tendre, ecrivit une lettre de compliments a son ancien camarade, et lui fit ces lignes pour le congratuler. Le petit marquis ne lui fit point de reponse: Colin en fut malade de douleur. Le pere et la mere donnerent d'abord un gouverneur au jeune marquis: ce gouverneur, qui etait un homme du bel air, et qui ne savait rien, ne put rien enseigner a son pupille. Monsieur voulait que son fils apprit le latin, madame ne le voulait pas. Ils prirent pour arbitre un auteur qui etait celebre alors par des ouvrages agreables. Il fut prie a diner. Le maitre de la maison commenca par lui dire: Monsieur, comme vous savez le latin, et que vous etes un homme de la cour.... Moi, monsieur, du latin! je n'en sais pas un mot, repondit le bel esprit, et bien m'en a pris: il est clair qu'on parle beaucoup mieux sa langue quand on ne partage pas son application entre elle et les langues etrangeres. Voyez toutes nos dames, elles ont l'esprit plus agreable que les hommes; leurs lettres sont ecrites avec cent fois plus de grace; elles n'ont sur nous cette superiorite que parcequ'elles ne savent pas le latin. Eh bien! n'avais-je pas raison? dit madame. Je veux que mon fils soit un homme d'esprit, qu'il reussisse dans le monde; et vous voyez bien que, s'il savait le latin, il serait perdu. Joue-t-on, s'il vous plait, la comedie et l'opera en latin? plaide-t-on en latin quand on a un proces? fait-on l'amour en latin? Monsieur, ebloui de ces raisons, passa condamnation, et il fut conclu que le jeune marquis ne perdrait point son temps a connaitre Ciceron, Horace, et Virgile. Mais qu'apprendra-t-il donc? car encore faut-il qu'il sache quelque chose; ne pourrait-on pas lui montrer un peu de geographie? A quoi, cela lui servira-t-il? repondit le gouverneur. Quand monsieur le marquis ira dans ses terres, les postillons ne sauront-ils pas les chemins? ils ne l'egareront certainement pas. On n'a pas besoin d'un quart de cercle pour voyager, et on va tres commodement de Paris en Auvergne, sans qu'il soit besoin de savoir sous quelle latitude on se trouve. Vous avez raison, repliqua le pere; mais j'ai entendu parler d'une belle science qu'on appelle, je crois, l'astronomie. Quelle pitie! repartit le gouverneur; se conduit-on par les astres dans ce monde? et faudra-t-il que monsieur le marquis se tue a calculer une eclipse, quand il la trouve a point nomme dans l'almanach, qui lui enseigne de plus les fetes mobiles, l'age de la lune, et celui de toutes les princesses de l'Europe? Madame fut entierement de l'avis du gouverneur. Le petit marquis etait au comble de la joie; le pere etait tres indecis. Que faudra-t-il donc apprendre a mon fils? disait-il. A etre aimable, repondit l'ami que l'on consultait; et s'il sait les moyens de plaire, il saura tout: c'est un art qu'il apprendra chez madame sa mere, sans que ni l'un ni l'autre se donnent la moindre peine. Madame, a ce discours, embrassa le gracieux ignorant, et lui dit: On voit bien, monsieur, que vous etes l'homme du monde le plus savant; mon fils vous devra toute son education: je m'imagine pourtant qu'il ne serait pas mal qu'il sut un peu d'histoire. Helas! madame, a quoi cela est-il bon? repondit-il; il n'y a certainement d'agreable et d'utile que l'histoire du jour. Toutes les histoires anciennes, comme le disait un de nos beaux esprits[1], ne sont que des fables convenues; et pour les modernes, c'est un chaos qu'on ne peut debrouiller. Qu'importe a monsieur votre fils que Charlemagne ait institue les douze pairs de France, et que son successeur ait ete begue? [1] Fontenelle. B. Rien n'est mieux dit! s'ecria le gouverneur: on etouffe l'esprit des enfants sous un amas de connaissances inutiles; mais de toutes les sciences la plus absurde, a mon avis, et celle qui est la plus capable d'etouffer toute espece de genie, c'est la geometrie. Cette science ridicule a pour objet des surfaces , des lignes, et des points, qui n'existent pas dans la nature. On fait passer en esprit cent mille lignes courbes entre un cercle et une ligne droite qui le touche, quoique dans la realite on n'y puisse pas passer un fetu. La geometrie, en verite, n'est qu'une mauvaise plaisanterie. Monsieur et madame n'entendaient pas trop ce que le gouverneur voulait dire; mais ils furent entierement de son avis. Un seigneur comme monsieur le marquis, continua-t-il , ne doit pas se dessecher le cerveau dans ces vaines etudes. Si un jour il a besoin d'un geometre sublime, pour lever le plan de ses terres, il les fera arpenter pour son argent. S'il veut debrouiller l'antiquite de sa noblesse, qui remonte aux temps les plus recules, il enverra chercher un benedictin. Il en est de meme de tous les arts. Un jeune seigneur heureusement ne n'est ni peintre, ni musicien, ni architecte, ni sculpteur; mais il fait fleurir tous ces arts en les encourageant par sa magnificence. Il vaut sans doute mieux les proteger que de les exercer; il suffit que monsieur le marquis ait du gout; c'est aux artistes a travailler pour lui; et c'est en quoi on a tres grande raison de dire que les gens de qualite (j'entends ceux qui sont tres riches) savent tout sans avoir rien appris, parcequ'en effet ils savent a la longue juger de toutes les choses qu'ils commandent et qu'ils paient. L'aimable ignorant prit alors la parole, et dit: Vous avez tres bien remarque, madame, que la grande fin de l'homme est de reussir dans la societe. De bonne foi, est-ce par les sciences qu'on obtient ce succes? s'est-on jamais avise dans la bonne compagnie de parler de geometrie? demande-t-on jamais a un honnete homme quel astre se leve aujourd'hui avec le soleil? s'informe-t-on a souper si Clodion-le-Chevelu passa le Rhin? Non, sans doute, s'ecria la marquise de La Jeannotiere, que ses charmes avaient initiee quelquefois dans le beau monde, et monsieur mon fils ne doit point eteindre son genie par l'etude de tous ces fatras; mais enfin que lui apprendra-t-on? car il est bon qu'un jeune seigneur puisse briller dans l'occasion, comme dit monsieur mon mari. Je me souviens d'avoir oui dire a un abbe que la plus agreable des sciences etait une chose dont j'ai oublie le nom, mais qui commence par un _B_.--Par un _B_, madame? ne serait-ce point la botanique?--Non, ce n'etait point de botanique qu'il me parlait; elle commencait, vous dis-je, par un _B_, et finissait par un _on_.--Ah! j'entends, madame; c'est le blason: c'est, a la verite, une science fort profonde; mais elle n'est plus a la mode depuis qu'on a perdu l'habitude de faire peindre ses armes aux portieres de son carrosse; c'etait la chose du monde la plus utile dans un etat bien police. D'ailleurs cette etude serait infinie; il n'y a point aujourd'hui de barbier qui n'ait ses armoiries; et vous savez que tout ce qui devient commun est peu fete. Enfin, apres avoir examine le fort et le faible des sciences, il fut decide que monsieur le marquis apprendrait a danser. La nature, qui fait tout, lui avait donne un talent qui se developpa bientot avec un succes prodigieux; c'etait de chanter agreablement des vaudevilles. Les graces de la jeunesse, jointes a ce don superieur, le firent regarder comme le jeune homme de la plus grande esperance. Il fut aime des femmes; et ayant la tete toute pleine de chansons, il en fit pour ses maitresses. Il pillait _Bacchus_ et _l'Amour_ dans un vaudeville, la nuit et le jour dans un autre, les charmes et les alarmes dans un troisieme; mais, comme il y avait toujours dans ses vers quelques pieds de plus ou de moins qu'il ne fallait, il les fesait corriger moyennant vingt louis d'or par chanson; et il fut mis dans l'_Annee_ litteraire au rang des La Fare, des Chaulieu, des Hamilton, des Sarrasin, et des Voiture. Madame la marquise crut alors etre la mere d'un bel esprit, et donna a souper aux beaux esprits de Paris. La tete du jeune homme fut bientot renversee; il acquit l'art de parler sans s'entendre, et se perfectionna dans l'habitude de n'etre propre a rien. Quand son pere le vit si eloquent, il regretta vivement de ne lui avoir pas fait apprendre le latin, car il lui aurait achete une grande charge dans la robe. La mere, qui avait des sentiments plus nobles, se chargea de solliciter un regiment pour son fils; et en attendant il fit l'amour. L'amour est quelquefois plus cher qu'un regiment. Il depensa beaucoup, pendant que ses parents s'epuisaient encore davantage a vivre en grands seigneurs. Une jeune veuve de qualite, leur voisine, qui n'avait qu'une fortune mediocre, voulut bien se resoudre a mettre en surete les grands biens de monsieur et de madame de La Jeannotiere, en se les appropriant, et en epousant le jeune marquis. Elle l'attira chez elle, se laissa aimer, lui fit entrevoir qu'il ne lui etait pas indifferent, le conduisit par degres, l'enchanta, le subjugua sans peine. Elle lui donnait tantot des eloges, tantot des conseils; elle devint la meilleure amie du pere et de la mere. Une vieille voisine proposa le mariage; les parents, eblouis de la splendeur de cette alliance, accepterent avec joie la proposition: ils donnerent leur fils unique a leur amie intime. Le jeune marquis allait epouser une femme qu'il adorait et dont il etait aime; les amis de la maison le felicitaient; on allait rediger les articles, en travaillant aux habits de noce et a l'epithalame. Il etait un matin aux genoux de la charmante epouse que l'amour, l'estime, et l'amitie, allaient lui donner; ils goutaient, dans une conversation tendre et animee, les premices de leur bonheur; ils s'arrangeaient pour mener une vie delicieuse, lorsqu'un valet de chambre de madame la mere arrive tout effare. Voici bien d'autres nouvelles, dit-il; des huissiers demenagent la maison de monsieur et de madame; tout est saisi par des creanciers; on parle de prise de corps, et je vais faire mes diligences pour etre paye de mes gages. Voyons un peu, dit le marquis, ce que c'est que ca, ce que c'est que cette aventure-la. Oui, dit la veuve, allez punir ces coquins-la, allez vite. Il y court, il arrive a la maison; son pere etait deja emprisonne: tous les domestiques avaient fui chacun de leur cote, en emportant tout ce qu'ils avaient pu. Sa mere etait seule, sans secours, sans consolation , noyee dans les larmes; il ne lui restait rien que le souvenir de sa fortune, de sa beaute, de ses fautes, et de ses folles depenses. Apres que le fils eut long-temps pleure avec la mere, il lui dit enfin: Ne nous desesperons pas; cette jeune veuve m'aime eperdument; elle est plus genereuse encore que riche, je reponds d'elle; je vole a elle, et je vais vous l'amener. Il retourne donc chez sa maitresse, il la trouve tete a tete avec un jeune officier fort aimable. Quoi! c'est vous, M. de La Jeannotiere; que venez-vous faire ici? abandonne-t-on ainsi sa mere? Allez chez cette pauvre femme, et dites-lui que je lui veux toujours du bien: j'ai besoin d'une femme de chambre, et je lui donnerai la preference. Mon garcon, tu me parais assez bien tourne, lui dit l'officier; si tu veux entrer dans ma compagnie, je te donnerai un bon engagement. Le marquis stupefait, la rage dans le coeur, alla chercher son ancien gouverneur, deposa ses douleurs dans son sein, et lui demanda des conseils. Celui-ci lui proposa de se faire, comme lui, gouverneur d'enfants. Helas! je ne sais rien, vous ne m'avez rien appris, et vous etes la premiere cause de mon malheur; et il sanglotait en lui parlant ainsi. Faites des romans, lui dit un bel esprit qui etait la; c'est une excellente ressource a Paris. Le jeune homme, plus desespere que jamais, courut chez le confesseur de sa mere; c'etait un theatin tres accredite, qui ne dirigeait que les femmes de la premiere consideration; des qu'il le vit, il se precipita vers lui. Eh! mon Dieu! monsieur le marquis, ou est votre carrosse? comment se porte la respectable madame la marquise votre mere? Le pauvre malheureux lui conta le desastre de sa famille. A mesure qu'il s'expliquait, le theatin prenait une mine plus grave, plus indifferente, plus imposante: Mon fils, voila ou Dieu vous voulait; les richesses ne servent qu'a corrompre le coeur; Dieu a donc fait la grace a votre mere de la reduire a la mendicite? Oui, monsieur.--Tant mieux, elle est sure de son salut.--Mais, mon pere, en attendant, n'y aurait-il pas moyen d'obtenir quelques secours dans ce monde?--Adieu, mon fils; il y a une dame de la cour qui m'attend. Le marquis fut pret a s'evanouir; il fut traite a peu pres de meme par tous ses amis, et apprit mieux a connaitre le monde dans une demi-journee que dans tout le reste de sa vie. Comme il etait plonge dans l'accablement du desespoir, il vit avancer une chaise roulante, a l'antique, espece de tombereau couvert, accompagne de rideaux de cuir, suivi de quatre charrettes enormes toutes chargees. Il y avait dans la chaise un jeune homme grossierement vetu; c'etait un visage rond et frais qui respirait la douceur et la gaiete. Sa petite femme brune, et assez grossierement agreable, etait cahotee a cote de lui. La voiture n'allait pas comme le char d'un petit-maitre: le voyageur eut tout le temps de contempler le marquis immobile, abime dans sa douleur. Eh! mon Dieu! s'ecria-t-il, je crois que c'est la Jeannot. A ce nom le marquis leve les yeux, la voiture s'arrete: C'est Jeannot lui-meme, c'est Jeannot. Le petit homme rebondi ne fait qu'un saut, et court embrasser son ancien camarade. Jeannot reconnut Colin; la honte et les pleurs couvrirent son visage. Tu m'as abandonne, dit Colin; mais tu as beau etre grand seigneur, je t'aimerai toujours. Jeannot, confus et attendri, lui conta, en sanglotant, une partie de son histoire. Viens dans l'hotellerie ou je loge me conter le reste, lui dit Colin; embrasse ma petite femme, et allons diner ensemble. Ils vont tous trois a pied, suivis du bagage. Qu'est-ce donc que tout cet attirail? vous appartient-il?--Oui, tout est a moi et a ma femme. Nous arrivons du pays; je suis a la tete d'une bonne manufacture de fer etame et de cuivre. J'ai epouse la fille d'un riche negociant en ustensiles necessaires aux grands et aux petits; nous travaillons beaucoup; Dieu nous benit; nous n'avons point change d'etat, nous sommes heureux, nous aiderons notre ami Jeannot. Ne sois plus marquis; toutes les grandeurs de ce monde ne valent pas un bon ami. Tu reviendras avec moi au pays, je t'apprendrai le metier, il n'est pas bien difficile; je te mettrai de part, et nous vivrons gaiement dans le coin de terre ou nous sommes nes. Jeannot eperdu se sentait partage entre la douleur et la joie, la tendresse et la honte; et il se disait tout bas: Tous mes amis du bel air m'ont trahi, et Colin, que j'ai meprise, vient seul a mon secours. Quelle instruction! La bonte d'ame de Colin developpe dans le coeur de Jeannot le germe du bon naturel, que le monde n'avait pas encore etouffe. Il sentit qu'il ne pouvait abandonner son pere et sa mere. Nous aurons soin de ta mere, dit Colin; et quant a ton bon-homme de pere, qui est en prison, j'entends un peu les affaires; ses creanciers, voyant qu'il n'a plus rien, s'accommoderont pour peu de chose; je me charge de tout. Colin fit tant qu'il tira le pere de prison. Jeannot retourna dans sa patrie avec ses parents , qui reprirent leur premiere profession. Il epousa une soeur de Colin, laquelle etant de meme humeur que le frere, le rendit tres heureux. Et Jeannot le pere, et Jeannotte la mere, et Jeannot le fils, virent que le bonheur n'est pas dans la vanite. FIN DE JEANNOT ET COLIN. *** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK, JEANNOT ET COLIN *** This file should be named jetc710.txt or jetc710.zip Corrected EDITIONS of our eBooks get a new NUMBER, jetc711.txt VERSIONS based on separate sources get new LETTER, jetc710a.txt Project Gutenberg eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the US unless a copyright notice is included. Thus, we usually do not keep eBooks in compliance with any particular paper edition. We are now trying to release all our eBooks one year in advance of the official release dates, leaving time for better editing. Please be encouraged to tell us about any error or corrections, even years after the official publication date. 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